Les factors passent à l’e-affacturage

Grandes manœuvres digitales chez les factors historiques pour capter une clientèle de TPE-PME… avant qu’elles ne cèdent aux sirènes des fintechs

Le nouvel Economiste Le nouvel Economiste | Publié le 1 février 2018
Les factors passent à l’e-affacturage

Plus que jamais, digitalisation, simplification et rapidité sont les trois axes de travail et de développement de l’ensemble des factors. La digitalisation – et son corollaire, la dématérialisation des factures – atteignent un tel niveau que certaines offres, proposées aussi bien par les sociétés d’affacturage “historiques” que par certaines fintechs, ont été cataloguées par certains comme relevant de l’e-affacturage. Car le challenge pour les factors est que les process deviennent de plus en plus rapides tout en fluidifiant au maximum le parcours client. Cette évolution nécessaire de l’affacturage vers l'e-affacturage répond avant tout aux besoins nouveaux des entreprises : simplicité, souplesse, rapidité.


par Cyril AndréAnnonce légale dans Le nouvel Economiste

“Le marché de l’affacturage évolue, car les besoins des entreprises évoluent. Nous allons toujours vers davantage de digitalisation de notre offre et, parallèlement, vers plus de simplification. La rapidité d’exécution est capitale. Aujourd’hui, nous sommes capables de financer un professionnel, une PME ou grand compte dans la journée”, assure Sébastien Ferdinand, directeur des relations clientèle chez BNP Paribas Factor. De façon générale, l’enjeu de la digitalisation est d’améliorer encore l’image de l’affacturage afin d’attirer la grande masse des PME. Mais si les factors font tout pour digitaliser leur activité, il faut que leurs clients suivent. “Nous constatons que les grands groupes sont tous dématérialisés, mais ce n’est pas le cas de l’ensemble des entreprises. La loi Macron a rendu obligatoire la dématérialisation des factures, et ce pour tous les acteurs du marché à échéance de 2020. Cela peut poser des difficultés pour les petites entreprises.

“La rapidité d’exécution est capitale. Aujourd’hui, nous sommes capables de financer un professionnel, une PME ou grand compte dans la journée”

Aujourd’hui, 95 % des factures que nous traitons sont dématérialisées. Et nous sommes en train de mettre en place une solution de dématérialisation des factures pour les 5 % restants”, explique Béatrice Collot, directrice générale de HSBC Factoring. La tendance est la même chez Crédit Agricole Leasing & Factoring (CALF) : “nous ne nous contentons pas d’avoir lancé une offre 100 % digitale comme Cash in time. Les offres d’affacturage classiques continuent, dans le même temps, à développer les fonctionnalités permises par le numérique. Nous avons par exemple investi fortement sur notre extranet client, donc un outil de gestion des contrats d’affacturage qui sera plus fluide et performant. La digitalisation permet encore davantage de transparence et de simplicité pour le client”, estime pour sa part Eugénie Aurange, directrice du développement des marchés de CALF.

Souplesse du picking sur les créances

Certains des grands factors proposent depuis peu des offres qui peuvent être qualifiées d’e-affacturage. Il en va ainsi de BNP Paribas Factor avec sa nouvelle solution baptisée Finzy. “Finzy est une offre 100 % digitale à destination des clients de notre réseau. Dans le cadre de cette offre, nous ne demandons aucun justificatif, ni aucun papier au client. Concrètement, il n’y a pas plus simple. Ce produit est aujourd’hui distribué par notre réseau bancaire et par BNP Paribas Factor. Nous finançons les créances dans les huit heures. Le client reçoit généralement son financement le soir même sur son compte bancaire, sauf le week-end”, précise Sébastien Ferdinand. La particularité de Finzy est que l’entreprise peut céder à son factor le nombre de créances qu’elle souhaite, même une ou deux. Elle va donc faire du picking sur ses créances. Cette solution est accessible 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. “Aujourd’hui, nous ne voyons plus les factures. L’ensemble du process est informatisé et automatisé. Nos conseillers ont là pour valider et pour accompagner et conseiller nos clients”, reprend-il. Ce produit est complémentaire à l’affacturage. Il fait partie d’une stratégie visant à convaincre les entreprises de venir à l’affacturage. “Cette solution est simple, rapide, pérenne, et par ailleurs d’un coût raisonnable. Lorsque le chef d’entreprise s’est habitué à Finzy, il va souvent s’intéresser à nos autres solutions d’affacturage” poursuit Sébastien Ferdinand.

L’exemple de la solution Cash in time de Crédit Agricole Leasing & Factoring illustre parfaitement cette nouvelle tendance du marché de l’affacturage. “Nous proposons Cash in time pour aller au-devant des TPE et PME qui n’ont pas recours à l’affacturage, car elles estiment, à tort, qu’il s’agit de solutions trop complexes ou uniquement faites pour les entreprises au bord du gouffre”, explique Eugénie Aurange. Cash in time répond à cette problématique de financement ponctuel alors que les offres classiques répondent à un besoin de plus long terme. “Ces besoins sont très différents. Ces deux offres vont durablement cohabiter, même s’il y aura des transferts de clients entre les deux. Nous allons aussi proposer nos offres d’affacturage plus classiques à nos clients de Cash in time. L’affacturage classique est intéressant pour le client s’il a un volume relativement important de factures à céder”, poursuit-elle.

Dématérialisation avancée de la relation client

Avec Cash in time, tout le process s’opère en ligne sans avoir à passer par un conseiller. Le client va tout seul sur la plateforme, il scanne sa ou ses factures et il reçoit son financement entre 6 et 24 heures. Si elle le souhaite, l’entreprise ne peut céder que quelques factures par mois. Le coût est fixe, à savoir 3,5 % du montant TTC de la facture. L’affacturage offre bien entendu la garantie de la facture que le factor achète, ainsi que le recouvrement. Avec cette solution, le client est informé si ses factures ont été réglées dans les temps, avec du retard ou qu’elles n’ont pas été honorées. C’est donc aussi pour lui un outil de gestion et d’optimisation du poste client.

D’autres factors ont fait le choix de ne pas encore proposer une solution type e-affacturage, à l’instar d’HSBC Factoring. Mais l’évolution est très rapide sur ce secteur, notamment du fait de la concurrence des fintechs et l’ensemble des factors possède une solution de ce type dans les cartons. “Aujourd’hui, nous ne proposons pas de dynamic discounting, à savoir une forme de picking de facture, le client choisissant de ne céder que telle ou telle facture et non pas l’ensemble de ses factures. Mais nous travaillons actuellement à la mise en place d’une solution de ce type. Pour l’instant, nous proposons à nos clients de racheter l’ensemble de leurs créances ou toutes les créances d’un certain nombre de leurs clients”, reprend Béatrice Collot de HSBC Factoring. À partir d’HSBC.net, les clients peuvent par exemple consulter les programmes d’affacturage, ils peuvent demander un financement et réaliser un certain nombre d’opérations depuis leur smartphone. HSBC finance alors les factures en 24 heures.

“En quelques mois, grâce à cette solution, nous avons capté plusieurs milliers de nouveaux clients, alors que nous en avons environ 10 000 pour nos autres solutions d’affacturage”

Sur ce plan, il n’y a donc pas de différence notable avec les fintechs qui proposent de l’e-affacturage. Pour les TPE, en entrée de gamme, BNP Paribas Factor propose des produits au forfait accessibles à partir de 10 000 euros de crédit. Le coût est inférieur à 2 % du montant de la facture. Ces forfaits sont évolutifs et peuvent aller jusqu’à 200 000 euros de crédit. Le client bénéficie d’une plateforme en ligne pour céder ses factures. Une application lui permet aussi de gérer son contrat depuis son mobile. Certes, tout est dématérialisé, mais un conseiller demeure tout de même à disposition des clients.

L’objectif majeur de cette évolution vers le tout-digital est certes pour les factors de satisfaire leurs clients, mais aussi et surtout de capter la majorité des entreprises françaises (essentiellement des TPE et des PME) qui ne sont pas encore factorées. “Une offre comme Cash in time a été conçue pour démocratiser l’affacturage. La plupart des clients de cette solution n’avaient jamais profité de l’affacturage auparavant, reprend Eugénie Aurange. En quelques mois, grâce à cette solution, nous avons capté plusieurs milliers de nouveaux clients, alors que nous en avons environ 10 000 pour nos autres solutions d’affacturage. Avec Cash in time, nous pouvons dire que nous sommes la première fintech bancaire”.

Les nouvelles attentes des entreprises

Cette conquête de nouveaux clients se fait grâce aux diverses solutions d’affacturage, toutes digitalisées. “Aujourd’hui, l’enjeu est de convaincre les TPE et les PME que cette source de financement dépasse le simple financement”, poursuit Sébastien Ferdinand. En effet, l’affacturage, au travers de ses différentes composantes, va permettre de financer l’entreprise, de recouvrir les factures des clients, mais aussi de faire du développement commercial. L’assurance-crédit est également appréciée par les TPE et PME. L’affacturage permet donc de protéger l’entreprise en cas de défaillance d’un ou plusieurs de ses clients importants.

En outre, l’évolution du marché et les nouvelles attentes des entreprises poussent les factors vers la simplification et vers le développement de deux aspects particulier de l’affacturage, à savoir le financement à l’export et le reverse factoring, qui est une autre manière de démocratiser l’affacturage par le biais des grands comptes. “Nous appliquons les mêmes méthodes de simplification et de digitalisation pour accompagner nos clients à l’export et dans le cadre du reverse factoring”, explique Sébastien Ferdinand.

“L’évolution du marché et les nouvelles attentes des entreprises poussent les factors vers la simplification et vers le développement de deux aspects particulier de l’affacturage, à savoir le financement à l’export et le reverse factoring”

Grâce au reverse factoring, les grands groupes peuvent mettre en place une solution de financement et de sécurisation pour leurs propres fournisseurs. Le coût correspond au prix du crédit du grand compte. BNP Paribas Factor est ainsi en train d’équiper les fournisseurs d’Engie en reverse factoring sur des plateformes très simples. “Cela permet aussi de démocratiser l’affacturage, car au travers du reverse factoring, nous touchons des entreprises que nous n’aurions pas forcément touchées autrement. Ces dernières entreprises prennent alors goût à l’affacturage et viennent vers nous. Elles sont aussi séduites par des prix qui sont aujourd’hui bas, car le marché est devenu ultra-compétitif ces dernières années” conclut Sébastien Ferdinand.

Les fintechs se démarquent-elles véritablement ?

Depuis quelques années, quelques start-up fintechs sont venues concurrencer les acteurs historiques de l’affacturage, et le vocable d’e-affacturage leur est souvent associé. Ces structures se positionnent souvent sur une niche de marché et ne réalisent que des volumes encore modestes, de l’ordre de quelques millions d’euros. “Selon moi, les fintechs n’ont pas révolutionné l’offre de l’affacturage. Elles ont des plateformes informatiques qui proposent des services digitaux, tout comme nous. La différence est qu’elles ne sont pas adossées à une banque, ce qui n’est d’ailleurs pas forcément un atout pour elles en termes de prix. Toutefois, nous travaillons avec quelques-unes. Je les vois davantage comme des partenaires que comme des concurrents. Je ne pense pas que nous soyons véritablement challengés dans notre modèle par ces fintechs”, estime Béatrice Collot, directrice générale de HSBC. Il est aussi vrai que certaines fintechs travaillent avec des plateformes davantage “client friendly”, donc plus agréable pour la consultation. Elles attirent notamment une clientèle qui ne souhaite pas forcément travailler avec un établissement bancaire, alors que l’ensemble des factors, en France, sont filiales d’une banque.

“Les fintechs sont nécessaires et ont joué leur rôle dans la démocratisation de l’affacturage, estime, pour sa part, Sébastien Ferdinand, directeur des relations clientèles chez BNP Paribas Factor. Elles ont de faibles volumes, mais elles jouent un rôle important. Ces fintechs nous ont notamment poussés à mieux communiquer et cela nous a renforcés dans l’idée qu’il nous fallait simplifier les process et être de plus en plus réactifs. L’avantage ses factors historiques par rapport aux fintechs est qu’ils sont adossés à une banque et à son réseau. Alors que les fintechs ont besoin d’une banque pour leur activité et pour se financer.”

Les idées reçues ont la vie dure

Beaucoup de TPE et PME font face à des besoins de trésorerie court terme qui peuvent mettre en risque leur activité, comme l’explique Eugénie Aurange, directrice du développement des marchés de Crédit Agricole Leasing & Factoring. Une partie de ces entreprises peut être sauvée grâce à ce type de solutions. Car souvent, ces entreprises ont un carnet de commandes rempli, elles ont juste un problème de trésorerie. Il faut aussi savoir que 25 % des défaillances d’entreprise sont directement liées au non-respect des délais de paiement. Sur ce plan, l’affacturage est une solution permettant à l’entreprise de disposer du paiement de ses créances en anticipation, et donc de pouvoir ainsi investir, payer ses propres fournisseurs, acheter des matières premières, etc.
Et pourtant, une minorité de TPE et de PME y ont recours en France. Mais il est vrai que toutes les activités ne sont pas factorables. Certains ne recherchent que l’effet déconsolidant, ce qui peut être un peu lourd à mettre en place, y compris pour une petite société. Par ailleurs, nombre de dirigeants pensent que l’affacturage demeure une solution plus onéreuse que d’autres modes de financement, ce qui n’est plus vrai depuis quelques années. “Pour d’autres, l’affacturage est l’antichambre de la mort et est donc réservé aux sociétés en difficulté, ce qui ne correspond évidemment pas à la réalité, estime Béatrice Collot, directrice générale de HSBC Factoring. D’autres encore estiment que l’affacturage est relativement contraignant, ce qui n’est pas vrai non plus, eu égard aux progrès réalisés en termes de souplesse. Il y a donc beaucoup d’idées préconçues sur l’affacturage qui éloignent encore les petites entreprises de l’affacturage.”

Sur les neuf premiers mois de 2017, la croissance des opérations d’affacturage a été de 6,6 %.
À fin septembre 2017, sur une année, le montant total des créances prises en charge s’est élevé à 280,9 MdsE, soit un volume multiplié par 2,5 au cours de la dernière décennie.

Source : ASF (Association française des sociétés financières)

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