Vaut-il mieux racheter une franchise plutôt que la créer ?

Racheter une franchise plutôt que la créer est plus sûr, mais reste soumis à la même condition de bonne entente avec le franchiseur

Le nouvel Economiste Le nouvel Economiste | Publié le 14 juin 2018
Vaut-il mieux racheter une franchise plutôt que la créer ?

Moins risquée mais plus coûteuse qu’une création pure, le rachat s’avère être une opération intéressante pour les candidats qui souhaitent se lancer rapidement dans leur nouvelle activité. Mais attention ! Bien que la négociation se déroule avec l’ancien franchisé, tous les contrats de franchise contiennent une clause prévoyant qu’en cas de cession, le repreneur soit agréé par le franchiseur. Une précaution légitime puisqu’il s’agit de maintenir un réseau d’entrepreneurs présentant la même image de marque.


par Didier WillotAnnonce légale dans Le nouvel Economiste

Considérée au cours des dix dernières années comme l’un des moyens les plus sûrs pour se lancer dans l’aventure entrepreneuriale, la création d’une entreprise nouvelle adossée à l’un des multiples réseaux de franchisés existant sur l’ensemble du territoire français semble céder de plus en plus souvent la place au rachat d’une entreprise appartenant déjà à l’un ou l’autre de ces réseaux. Tel est, en tout cas, l’une des conclusions que l’on peut tirer de l’édition 2018 de l’enquête sur le secteur de la franchise en France, réalisée chaque année par le groupement des Banques Populaires pour le compte de la Fédération française de la franchise, avec la participation de l’institut CSA et du magazine ‘L’Express’. En parallèle, 38 % des franchisés interrogés à cette occasion ont affirmé souhaiter vendre leur commerce d’ici à la fin de l’année 2018. “Si le rachat d’une franchise est sans aucun doute plus coûteux, il constitue sans aucun doute une excellente opportunité pour les entrepreneurs qui souhaitent se mettre à leur compte en ayant une bonne visibilité sur l’activité dans laquelle ils souhaitent se lancer” confirme Michel Kahn, président de l’Iref (Fédération des réseaux européens de partenariat et de franchise), qui vient de publier la septième édition de son ouvrage ‘Franchise et partenariat’ aux Éditions Dunod.

Accès simplifié

Inutile d’insister sur les nombreux avantages que procure la signature d’un contrat de franchise. Ce système venu des États-Unis, qui s’est largement répandu dans toute l’Europe, et notamment en France à partir des années 1980, permet à un chef d’entreprise propriétaire de son affaire, indépendant juridiquement et financièrement – le franchisé – de limiter les risques d’échec en s’appuyant sur un modèle économique qui a déjà fait ses preuves. Il profite en effet de l’image de marque et de la notoriété d’une enseigne    Définition Enseigne commerciale :
La loi du 29 décembre 1979 définie l’enseigne commerciale comme « toute inscription, forme ou image apposée sur un immeuble et relative à l’activité qui s’y exerce ».
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existante grâce aux dispositifs de formation et d’accompagnement ainsi qu’à la logistique, la puissance d’achat et les moyens publicitaires qui sont mis à la disposition de l’ensemble du réseau par le franchiseur… Bref, doté d’un concept qu’il a dans un premier temps mis au point, développé et exploité pour son propre compte, le franchiseur propose ensuite son expérience et son savoir-faire à un franchisé en échange du paiement d’un droit d’entrée et d’une redevance généralement indexée sur le volume d’affaires réalisé. Bien entendu, les candidats à la franchise doivent témoigner en contrepartie des qualités et de l’intérêt requis par les responsables de l’enseigne qu’ils s’apprêtent à intégrer.

“Les prévisions financières étant plus faciles à établir, les établissements bancaires seront davantage enclins à accepter une demande de prêt pour un rachat d’entreprise que pour une simple création”

Dans ces conditions, vaut-il mieux créer une entreprise ex nihilo ou racheter une entreprise franchisée déjà existante ? Régulièrement, en effet, pour des raisons liées à une fin de contrat, à un départ à la retraite ou parfois à des difficultés de gestion, une part significative des quelque 70.000 entreprises franchisées de France s’inscrivent sur le marché de la reprise. Naturellement, le coût d’un rachat est plus élevé que celui d’une création. Cela s’explique par le fait que le chiffre d’affaires et les comptes de résultat sont connus, que la clientèle est constituée, que le personnel est formé et que le point de vente est déjà aménagé aux normes du franchiseur… Mais en contrepartie, une telle opération permet de simplifier les démarches d’accès aux avantages de la franchise. En effet, l’acheteur n’aura pas à assumer les différentes étapes liées à l’intégration au réseau et pourra s’installer directement dans un local aménagé selon les besoins de l’enseigne. De plus, une entreprise déjà lancée bénéficie d’une équipe de prestataires et de fournisseurs bien en place… Autre avantage important : les prévisions financières étant plus faciles à établir, les établissements bancaires seront davantage enclins à accepter une demande de prêt pour un rachat d’entreprise que pour une simple création. Opinion confirmée par les équipes spécialisées au sein des Banques Populaires : “Nous finançons aussi bien des projets de création que des rachats d’entreprises franchisées, explique Florence Soubeyran, responsable commerce et franchise pour le réseau des Banques Populaires. Mais les rachats bénéficient d’un double atout : l’entreprise dispose des bilans et des comptes d’exploitation des années précédant la transaction, et le porteur de projet est très souvent issu du réseau, soit comme salarié soit comme déjà franchisé. Quant au candidat ne venant pas du réseau, il bénéficiera de l’accompagnement de son franchiseur, ce qui permettra de maximiser ses chances de réussite”.

Mariage à trois

Toutefois, si la reprise d’une entreprise déjà franchisée présente de réels avantages, l’opération mérite toujours d’être étudiée de près. Aux risques habituels liés à la reprise d’une entreprise concernant ses perspectives d’avenir et sa rentabilité future, s’ajoutent les problèmes posés par le caractère spécifique du contrat signé entre tout franchiseur et chacun de ses franchisés. “Le choix définitif du repreneur demande toujours un temps relativement long, plusieurs semaines en général”, analyse Benoît Lahaye, président-fondateur de l’enseigne Attila, qui regroupe plus de 80 sociétés spécialisées dans l’entretien des toitures. Le secteur sur lequel se situe l’entreprise a-t-il encore de belles années devant lui ? La passation de pouvoir se passera-t-elle aisément ? Les équipes en place accepteront-elles le repreneur ? Comment réagiront les partenaires de l’entreprise ? Autant de questions – entre autres – que toutes les parties prenantes seront amenées à se poser tout au long de la phase de négociation. En effet, à la différence du rachat d’une entreprise indépendante qui met en relation uniquement un vendeur et un acheteur, le rachat d’une entreprise franchisée nécessite l’intervention d’une troisième entité, celle du franchiseur responsable de l’homogénéité des pratiques managériales sur l’ensemble du réseau. Bien que la transaction soit conclue entre l’ancien et le nouveau franchisé, il doit s’assurer que les candidats à la reprise s’engageront à respecter les clauses spécifiques à son contrat, et notamment toutes celles qui concernent le concept et l’image de l’enseigne.

“Les contrats de franchise contiennent toujours une clause indiquant que le franchisé ne pourra céder son affaire qu’à un acheteur agréé par le franchiseur”

En effet, le franchiseur garde naturellement un droit de regard sur le profil de ceux qui souhaitent rejoindre son réseau et les contrats de franchise contiennent toujours une clause indiquant que le franchisé ne pourra céder son affaire qu’à un acheteur agréé par le franchiseur. C’est ce que les juristes appellent le caractère intuitu personae de ce type de contrat qui engage une personne, et non une entreprise, et qui prévoit que dans le cas où un franchisé céderait son activité à un successeur non agréé, le contrat serait immédiatement résilié. “Lorsque l’un de nos franchisés souhaite revendre son fonds de commerce, tout acheteur potentiel, qu’il soit proposé par le vendeur ou venu par nous-mêmes, suivra le même process de validation qu’un candidat à l’ouverture d’une nouvelle franchise” confirme Laurent Nogrette, directeur général associé du réseau Glastint, spécialisé dans la pose de films sur vitrages dans les secteurs de l’automobile et du bâtiment.

Réussir la transition

Enfin, si l’investisseur qui reprend une franchise existante bénéficie d’un outil de travail opérationnel, d’un personnel déjà formé et d’une clientèle acquise, il se doit d’être efficace dès qu’il s’installe aux commandes de son entreprise. À la différence de celui qui crée une boutique ex nihilo, il n’a guère le temps de se roder à sa nouvelle activité. “C’est pourquoi nous incitons les franchisés sortants à accompagner les nouveaux entrants, qu’ils soient exploitants directs ou investisseurs, pendant un temps suffisamment pour s’assurer de la réussite de l’opération de transmission”, insiste Chantal Zimmer, déléguée générale de la Fédération française de la franchise. Une précaution utile pour les franchiseurs qui tiennent à conserver intacte l’image de marque qu’ils entendent donner à l’ensemble de leur réseau. Ils ont en effet l’obligation de maintenir la valeur de chacun de leurs fonds de commerce afin de ne pas créer de décalage trop important entre leurs différents points de vente.

“Le taux moyen de pérennité des entreprises françaises franchisées atteint, après trois années d’exercice, 73 % pour les entreprises rachetées contre 62 % pour les entreprises nouvellement créées”

Parce qu’il nécessite l’accord définitif de trois parties prenantes, le rachat d’une entreprise franchisée s’avère le plus souvent une opération longue et délicate pour laquelle chacun des partenaires a pris l’habitude de s’entourer de conseillers professionnels, en matière financière notamment. Heureusement, en contrepartie, l’acquéreur est assuré que le risque d’échec est nettement inférieur à celui qu’il encourrait s’il se lançait dans la création d’une entreprise nouvelle sous la même enseigne. En effet, les derniers chiffres publiés par l’agence France Entrepreneur montre que le taux moyen de pérennité des entreprises françaises franchisées atteint, après trois années d’exercice, 73 % pour les entreprises rachetées contre 62 % pour les entreprises nouvellement créées.

Les différents contrats de commerce associé

Partage d’une enseigne, mise en œuvre d’une assistance technique et transmission d’un savoir-faire… Simple dans son principe, le système du commerce associé se décline toutefois sous la forme de différents contrats adaptés aux profils et aux projets des partenaires concernés. On les classe généralement selon cinq catégories :

1. La concession.

Dans ce type de contrat, le franchiseur réserve au franchisé l’exclusivité de la vente d’un produit, pendant une période limitée et dans une zone géographique déterminée, à la condition qu’il respecte certaines contraintes dont les modalités sont fixées librement par les parties.

2. La licence de marque.

Le contrat de licence est un accord selon lequel le franchisé autorise le franchisé à utiliser (d’une manière exclusive ou non) sa marque moyennant le versement d’une redevance. D’une manière générale, un tel contrat ne prévoit ni formation, ni assistance, ni transfert de savoir-faire de la part du franchiseur.

3. La coopérative.

Plus souple que les contrats précédents, le contrat de coopérative prévoit que franchisé entre au sein d’une coopérative constituée par le franchiseur en achetant une part du capital. Ce qui est généralement moins onéreux que le droit d’entrée dans une franchise, mais qui permet à l’adhérent de quitter le réseau à tout moment.

4. Le partenariat.

Relativement proche de la franchise, le contrat de partenariat est fondé sur un échange de connaissances et d’expériences entre les deux parties. Il se distingue aussi par la réciprocité de l’intuitu personae : les deux partenaires se choisissent mutuellement, alors qu’un franchisé ne peut remettre en cause son contrat si les responsables du réseau changent.

5. La commission-affiliation.

Particulièrement bien adapté au secteur du textile, le contrat de commission-affiliation repose sur des fondements identiques à ceux d’un contrat de franchise traditionnel, à la différence toutefois que le stock demeure la propriété du franchiseur.

Les franchiseurs aiment les couples

C’est l’une des caractéristiques essentielles du mode d’exploitation d’une boutique en franchise : un nombre relativement important de franchisés travaillent en couple. Deux formules possibles : soit les deux conjoints sont juridiquement associés, soit l’un d’entre eux procède au recrutement de l’autre comme salarié ou comme conjoint collaborateur. C’est ainsi que dans la plupart des supérettes, on voit très souvent monsieur au réassort et madame à la caisse, ou que dans les stations-service, monsieur assure la partie entretien automobile tandis que madame s’occupe de la boutique et de la caisse.

Il est vrai de nombreux franchiseurs sont tout à fait favorables à ce mode d’exploitation de leur boutique. C’est le cas, par exemple, de la société de réparation automobile Midas, des cuisinistes SoCoo’C et Cuisine Plus, des enseignes de distribution alimentaire Vival et Spar ainsi que de stations-service Total… La raison ? La plupart des franchiseurs considèrent en effet que le franchisé doit voir, dans un premier temps au moins, son travail devenir la chose la plus importante de sa vie, et que dans ces conditions, il est souhaitable qu’il associe étroitement son conjoint à l’évolution de sa situation professionnelle. C’est pourquoi les franchiseurs s’autorisent parfois à poser des questions un peu personnelles aux candidats à la franchise qui se présentent devant eux !

Le secteur de la franchise représente en France près de 2.000 enseignes comptant un total d’environ 75.000 points de vente pour un CA de l’ordre de 60 MdsE et un effectif total (direct et indirect) proche de 700.000 emplois.

À la question : En tant que franchisé, vous estimez-vous mieux armé qu’un commerçant traditionnel pour céder votre entreprise ?
68 % des franchisés ont répondu oui, 28 % non et 4 % ne savaient pas
Dans le cas où vous seriez amenés à céder votre entreprise, à qui pourriez-vous envisager de le faire ? :
- à l’un de vos salariés : 23 %
- à un autre franchisé : 17 %
- à un nouveau franchisé : 16 %
- à votre franchiseur : 11 %
- à un commerçant sans enseigne : 4 %
- à une autre personne : 16 %

Source : 14e édition de l’enquête Banque Populaire/FFF sur la franchise.

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