Relation client, recrutement de franchisés, communication interne… Vent de digitalisation sur le secteur de la franchise
Principale conclusion de la dernière enquête annuelle sur le secteur réalisée par la Banque Populaire : la franchise continue de bien se porter. Parmi les raisons qui expliquent cette situation, les spécialistes indiquent en priorité la grande capacité d’adaptation dont les nombreux réseaux ont fait preuve au cours des dernières années. Et notamment en matière d’utilisation des nouvelles technologies numériques. Tout d’abord en vue de dynamiser leur activité commerciale, mais aussi, et de plus en plus souvent aujourd’hui, pour améliorer la qualité des relations entre les franchiseurs et leurs franchisés.
Malgré la conjoncture générale difficile que connaît la France depuis quelques années, le secteur économique de la franchise (auquel on peut ajouter celui du commerce associé en général) semble avoir tiré une nouvelle fois son épingle du jeu l’an dernier. Telle est la conclusion essentielle de la dernière enquête réalisée annuellement depuis plus de dix ans par la Banque Populaire en partenariat avec la Fédération française de la franchise. Publiée il y a quelques semaines, elle indique par exemple que les franchiseurs ont ouvert en moyenne sept nouveaux points de vente l’an dernier, tandis que plus de 40 % des franchisés ont enregistré une augmentation de leur chiffre d’affaires ou créé au moins un emploi pendant la même période (44 % et 41 % respectivement). Autre chiffre significatif : près de trois franchiseurs sur dix projettent d’investir dans la création d’un nouveau point de vente au cours des prochains mois.
Comment expliquer un tel dynamisme ? Essentiellement par le fait, conclut l’étude FFF-Banque Populaire, que les réseaux de franchise ont su faire preuve d’une grande capacité d’innovation au cours des dernières années. Non seulement en modernisant leurs équipements, en élargissant leurs gammes de produits et de services ou en faisant évoluer leurs concepts, mais surtout en utilisant de plus en plus souvent les possibilités offertes par les nouvelles technologies digitales. Conclusion confirmée par Michel Kahn, fondateur de Michel Kahn Consultants et auteur de l’ouvrage ‘Franchise et partenariat’ publié aux Editions Dunod : “Après avoir commencé par mettre les techniques numériques au service des relations avec leur clientèle, les franchiseurs sont de plus en plus nombreux à en faire un outil important de la relation avec leurs franchisés.”
Le bouleversement numérique
Retour sur la fin de la précédente décennie. Alors que le modèle économique de la franchise consistait à confier à chacun de ses franchisés l’exclusivité de la relation commerciale avec les clients sur un territoire déterminé, la révolution numérique est venue bouleverser ce schéma traditionnel. En offrant au consommateur la possibilité de s’adresser par l’intermédiaire d’Internet indifféremment au franchiseur ou à l’un de ses franchisés, elle a contraint la plupart des réseaux à mettre en place une véritable stratégie commerciale multicanale. C’est ainsi que la quasi-totalité des franchiseurs disposent désormais d’un site Internet dont la vocation est de convaincre la clientèle de se rendre dans les magasins à leur enseigne Définition Enseigne commerciale :
La loi du 29 décembre 1979 définie l’enseigne commerciale comme « toute inscription, forme ou image apposée sur un immeuble et relative à l’activité qui s’y exerce ».
Lire la suite. On y trouve généralement, outre une rubrique permanente de présentation des produits disponibles et de géolocalisation des points de vente, des annonces concernant les manifestations ou les opérations promotionnelles organisées épisodiquement dans l’une ou l’autre des boutiques du réseau. Dans la même logique, les franchiseurs sont de plus en plus nombreux à conforter ce dispositif par une présence forte sur les réseaux sociaux. Objectif : valoriser leur marque et leurs produits en y publiant régulièrement des informations nouvelles et en invitant les clients à s’y exprimer. “Dans la mesure où les consommateurs sont de plus en plus enclins à partager leur expérience sur les réseaux sociaux, les blogs ou les comparateurs, 60 % des franchiseurs ont déjà mis en place un dispositif de suivi de l’e-réputation de leur marque”, peut-on lire dans l’étude FFA-Banques populaires.
“La quasi-totalité des franchiseurs disposent désormais d’un site Internet dont la vocation est de convaincre la clientèle de se rendre dans les magasins à leur enseigne”
Même approche chez les franchisés qui sont aujourd’hui très nombreux, eux aussi, à utiliser leurs propres sites ainsi que les réseaux sociaux pour relayer les informations transmises par leurs franchiseurs ou pour faire connaître les événements ou les promotions concernant spécifiquement l’actualité de leur point de vente. C’est ainsi, par exemple, que le réseau d’agences immobilières ERA a construit un maillage de sites ultra-ciblés qui lui permet d’assurer une présence active sur l’ensemble du territoire national. En plus du site national à vocation essentiellement “corporate” et des 20 sites régionaux communs à l’ensemble des agences implantées sur la zone géographique concernée, chacun des franchisés gère un site dédié à ses propres activités tandis que chaque agent commercial dispose, lui, de sa plateforme personnelle.
Le développement du “click and collect”
Autre tendance forte : le développement dans la plupart des réseaux du e-commerce. Soit directement en ligne avec livraison au domicile de l’acheteur, soit sous la forme d’un système dit “click and collect” qui permet au client potentiel de procéder à une commande en ligne sur le site du franchiseur et de retirer ensuite son achat dans la boutique physique de l’un ou l’autre des franchisés du réseau. Utilisé depuis plusieurs années déjà par des grandes enseignes nationales comme Darty ou la Fnac, le système est en train de s’étendre aux réseaux de franchises spécialisés dans la prestation de services aux particuliers. Exemple : celui de la société Ogust, spécialisée dans l’édition de logiciels pour le secteur des services à la personne, qui a lancé l’automne dernier un nouveau produit intitulé Ogust SelfService. Accessible en mode cloud sans installation locale, il permet aux sociétés clientes de créer leur propre boutique e-commerce en quelques clics et d’offrir ainsi à l’utilisateur final la possibilité de sélectionner et de payer directement en ligne les services correspondant à ses besoins. “En facilitant leur transition numérique, assure Karim Abichat, son PDG, nous permettons ainsi aux entreprises spécialisées dans les services à la personne d’améliorer l’expérience client et d’éloigner le risque d’une ubérisation toujours présent dans un secteur aussi éclaté.”
“Comme la plupart des autres secteurs économiques, la franchise commence à entrer véritablement dans l’ère du big data”
Mais aujourd’hui, comme la plupart des autres secteurs économiques, la franchise commence à entrer véritablement dans l’ère du big data. Grâce à la digitalisation progressive de ses activités, elle dispose désormais de données statistiques fiables concernant les habitudes d’achat de ses clients. En ligne ou dans les boutiques ? Selon quelle fréquence ? À quel moment de la journée ? Pour quel panier moyen ? Autant d’informations qui, analysées et retraitées, permettent d’identifier des comportements, de dégager des tendances et finalement d’élaborer des offres promotionnelles adaptées au profil des différentes catégories de consommateurs. C’est ainsi que le réseau Courtepaille, qui compte près de 300 restaurants en France dont un bon tiers de franchisés, a pu distinguer différents profils types de clientèle allant du client très fidèle voisin du restaurant au client occasionnel sur la route des vacances. “Une segmentation qui nous est très utile pour définir le contenu de nos offres promotionnelles et le mode d’accompagnement de nos clients” expliquent Karim Soleilhavoup et Pauline Belin, respectivement directeur du marketing et responsable digital de l’enseigne.
Des plateformes collaboratives franchiseurs-franchisés
Enfin, depuis quelque temps déjà, les nouvelles technologies mises en œuvre dans le secteur de la franchise s’étendent du domaine strictement commercial à celui de l’organisation interne des réseaux. Ainsi, la plupart d’entre eux ont créé des plateformes collaboratives destinées à favoriser la circulation de l’information entre les franchiseurs et leurs franchisés. Elle peut prendre la forme, selon les cas, de l’annonce du lancement d’un nouveau produit, de la mise en place d’une nouvelle offre promotionnelle, d’une session de formation en e-learning ou encore de la tenue d’une réunion de travail en ligne… Mais surtout, les franchiseurs utilisent de plus en plus souvent les nouvelles technologies pour recruter de nouveaux franchisés et favoriser ainsi le développement de leur enseigne. Constatant que les créateurs d’entreprises désireux d’obtenir une franchise sont de plus en plus souvent tentés de rechercher sur Internet le “réseau idéal” susceptible de les accueillir, nombre de franchiseurs ont créé des espaces numériques dédiés au recrutement de nouveaux franchisés. C’est le cas, par exemple, du groupe Propriétésprivées.com, spécialiste de l’immobilier en ligne (10 millions d’euros de chiffre d’affaires l’an dernier) qui accroît régulièrement son réseau de négociateurs sur le terrain en sélectionnant les candidatures déposées sur ses sites. “Depuis la création de notre entreprise il y a plus de dix ans maintenant, nous avons ainsi mis sur pied un réseau de plus de 700 mandataires couvrant sous différents statuts Définition Statuts :
Les statuts sont un acte constitutif d'une société ou d'une association et en fixent les règles de fonctionnement.
Lire la suite la totalité du territoire national” précise le pdg Michel Le Bras.
“Les franchiseurs utilisent de plus en plus souvent les nouvelles technologies pour recruter de nouveaux franchisés et favoriser le développement de leur enseigne”
Dans la même logique, il existe maintenant des dispositifs qui facilitent le travail de recherche des candidats potentiels en regroupant sur un seul et même site les offres de plusieurs franchiseurs différents. Exemple : Toute la franchise, créé dans la foulée du Salon Virtuel des Franchises, dont le portail offre au visiteur la possibilité de trouver la franchise qui lui convient en fonction des critères les plus pertinents à ses yeux : le secteur d’activité, la ville d’implantation, l’image de l’enseigne, le montant de l’apport personnel… Une mutualisation qui s’inscrit dans une logique véritablement gagnant-gagnant. Elle permet en effet au franchiseur de réduire sensiblement le coût des investissements nécessaires à l’extension de son réseau, et au franchisé de trouver l’enseigne correspondant à son profil de créateur d’entreprise.
Attention ! Malgré une apparence similaire aux yeux du consommateur, il existe en réalité deux catégories de réseaux de commercialisation de produits (ou de services) sous une même enseigne. Et le droit français distingue ainsi :
- Les réseaux de franchise qui reposent sur un accord commercial et contractuel entre deux entités juridiquement indépendantes : le franchiseur et le franchisé. Le premier s’engage à transmettre les droits d’utilisation de sa marque et son savoir-faire (sous la forme d’une assistance tout au long de la durée du contrat) à un franchisé, qui est contraint de verser en contrepartie une rémunération sous la forme d’un droit d’entrée, puis d’une redevance sur son chiffre d’affaires. Le dispositif est encadré par la loi Doubin du 31 décembre 1989 qui impose essentiellement au franchiseur de transmettre à son franchisé un document précontractuel d’informations 20 jours au moins avant la signature du contrat.
- Les réseaux de commerce associé qui regroupent des commerçants juridiquement indépendants désireux de mettre en commun des segments de leur activité : leur puissance d’achat, leur logistique, leur puissance commerciale, leur système informatique ou leur communication… Ils prennent généralement la forme d’une société anonyme coopérative de commerçants dans laquelle les actionnaires mutualisent un certain nombre de moyens. – exemples : une centrale d’achat, une marque propre, un logiciel, un programme de fidélité – tout en restant maîtres de la gestion et de la mise en œuvre de la stratégie commerciale de leur entreprise.
En 2016, la franchise reste un modèle attirant pour les créateurs d’entreprises potentiels. Si plus de 3 Français sur 10 (31 % précisément) ont déclaré l’an dernier avoir le souhait de créer leur entreprise ou de se mettre à leur compte, ils sont en effet près de 5 sur 10 (48 % exactement) à envisager de le faire dans le cadre d’un contrat de franchise. Soit un pourcentage supérieur de 8 points à celui qui avait été constaté lors de l’enquête FFF-Banque Populaire réalisée en 2015. À noter que les raisons évoquées pour justifier cette attirance pour le système de la franchise enregistrent elles aussi une forte hausse. C’est le cas pour le bénéfice apporté par la notoriété de la marque (+9 points), l’accompagnement fourni par l’ensemble du réseau des franchisés (+6 points) ou encore la limitation des risques financiers encourus par l’aventure entrepreneuriale (+7 points).
Des chiffres qui entrent en cohérence avec l’optimisme affiché dans l’ensemble des réseaux, tant du côté des franchiseurs que du côté des franchisés, lors de la dernière enquête FFF-Banque Populaire qui portait sur l’exercice 2016. C’est ainsi que 74 % des franchiseurs ont déclaré avoir renforcé l’an dernier leur dispositif d’accompagnement des franchisés, tandis que 76 % des franchisés affirmaient avoir mieux résisté à la crise qu’un commerçant isolé. Autre chiffre significatif : près de 90 % d’entre eux sont tout à fait décidés à poursuivre leur activité au sein de leur réseau actuel au cours des prochaines années.
76 % des franchisés déclarent résister mieux à la crise qu’un commerçant isolé.
41 % des franchisées ont créé au moins un emploi en 2016.
9 franchisés sur 10 ont mis en place un dispositif “web to store”.
Source : Enquête Fédération française de la franchise-Banque Populaire 2016